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ques mots devant les enfants au sujet des nouveaux camarades qui devaient venir partager leurs jeux. Georges et Louise accueillirent la nouvelle comme une chose toute naturelle, et d’un commun accord portèrent leurs regards sur Lucien, comme pour lui demander ce qu’il pensait de cela.

Lucien se mordit les lèvres, mais il ne dit rien sur le moment.

Quand Mme Gilbert fut partie, Georges demanda à Lucien: « Les connaissez-vous ?

— Je les connais de vue, répondit-il d’un ton bref.

— Alors vous ne savez pas s’il sont gentils ? »

Lucien secoua les épaules.

« S’ils n’étaient pas gentils, reprit Louise avec vivacité, maman ne leur permettrait pas de venir jouer avec nous. »

Cet argument frappa les deux garçons, mais d’une manière différente.

« Gentils ou non, dit Lucien d’un air sérieux, je sais bien que je ne les aimerai jamais autant que vous deux.

—S’ils sont gentils, reprit Georges, on pourra faire de bonnes parties ; mais, ajouta-t-il d’un air de mystère: Nous trois, nous serons toujours nous trois, n’est-ce pas, Lucien ?

— C’est bien sûr, » répondit Lucien, en serrant les deux rebords de sa petite voiture de ses doigts maigres et pâles.

Tout le reste de la journée, Lucien fut plus agité que d’habitude ; par moments, il tombait dans des accès de rêverie. Mme Gilbert et ses enfants s’en aperçurent, et redoublêrent de tendresse envers lui.

Quand Mme Gilbert s’approchait de sa voiture, il lui prenait la main, et lui disait en levant les yeux vers elle: « Ma maman à moi !

— Votre maman à vous, bien à vous ! » lui disait-elle ; et elle se penchait vers lui, pour l’embrasser.

Il saisissant tous les occasions de dire « nous trois ! » et caressait Pateau avec un redoublement de tendresse.

Les deux insurgés de la maison Minias arrivèrent le lendemain à l’heure de la récréation, sous la conduite d’un valet de pied qui les quitta au seuil de la porte, sa mission se terminant là. Ils avaient été si bien sermonnés par leur père, leur mère, Mlle Foulonne et les cinq chanoinesses, qu’ils parurent d’abord tout décontenancés,