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LA FRANCE ILLUSTRÉE

château qu’il se plut à habiter ; son fils, Philippe VI, y séjourna aussi. Ce château n’était pas fortifié, aussi fut-il souvent pris et repris pendant la guerre des Bourguignons et des Armagnacs. François Ier, grand amateur de la chasse, venait souvent à Villers-Cotterets à cause du voisinage de la forêt ; il fit reconstruire le château à peu de distance de l’ancien et en fit une des plus belles résidences royales de son époque. C’est pendant un de ses séjours qu’il data de Villers-Cotterets, le 10 août 1539, le fameux édit qui prescrivait qu’à l’avenir les actes publics et les jugements seraient rendus en français, et que les curés tiendraient des registres de baptême et de décès. Charles-Quint, avant la signature du traité de Crépy-en-Valois (1544), habita le château tandis que son armée tenait la campagne. Henri II et plus tard ses fils, François II et Charles IX, y séjournèrent également. Plus tard, ce domaine devint la propriété des ducs d’Orléans, et l’un d’eux, Louis-Philippe (Égalité), fit faire au château de prétendus embellissements qui le défigurèrent complètement. Devenu bien national après la Révolution, il fut transformé en dépôt de mendicité ; quant à l’ancienne abbaye de Saint-Remi, c’est aujourd’hui une propriété particulière.

Villers-Cotterets, traversée par la grande route de Soissons, se compose de deux longues rues principales qui se coupent à angle droit ; on y fabrique des dentelles, de la bonneterie, de la boissellerie et des jouets ; l’industrie forestière y est une des principales sources de revenu ; on y voit plusieurs scieries mécaniques, et elle est le siège d’une inspection, d’une sous-inspection forestière et d’un garde des forêts. La forêt de Villers-Cotterets n’a pas moins de 12,500 hectares ; un petit chemin de fer de 9 kilomètres conduit les bois exploités au Port-aux-Perches, point où la rivière d’Ourcq devient navigable, c’est la tête d’un embranchement qui doit joindre (1879) à Château-Thierry la grande ligne du Nord avec celle de l’Est. Villers-Cotterets est la patrie du littérateur Demoustier et d’Alexandre Dumas père.



Berzy-le-Sec. — Berzy-le-Sec, station du chemin de fer de Paris à Laon, est un petit village de l’arrondissement et du canton de Soissons, situé à 6 kilomètres au sud de cette dernière ville ; sa population ne dépasse pas 443 habitants. C’est un des plus anciens villages du Laonnais ; il dépendit d’abord du domaine royal, passa ensuite à l’abbaye de Saint-Médard et fut plus tard érigé en vicomté. Il possède une belle église romane dont quelques parties sont fort curieuses ; son ancien château est converti en ferme ; il n’en reste que l’enceinte quadrilatérale et la porte flanquée de deux tours à mâchicoulis.

Berzy a conservé jusqu’à la Révolution plusieurs coutumes populaires assez curieuses : chaque année, le 8 novembre, on y ouvrait un concours de grimaces ; un prix était décerné à qui faisait la plus laide. Le jour de la fête de saint Quentin, patron du village, le curé mettait aux enchères la première contredanse ; le montant de l’adjudication était acquis à la chapelle de la Vierge. La nuit de Noël, les bergers du village offraient à l’église un agneau mâle et sans tache.



Vervins (lat. 49° 50 8" ; long. 1° 34’ 16" E.). — Vervins, station de la ligne de Paris à Hirson, chef-lieu d’arrondissement, sur un des bras du Vilpion, petit affluent de la Serre, à 38 kilomètres au nord-est de Laon, est une petite ville très ancienne dont Ptolémée fait mention sous le nom de Verbinum ; c’était la principale ville de la Thiérache ; elle eut d’abord des évêques particuliers. L’un d’eux, Thomas de Marle, frère d’Enguerrand III de Coucy, octroya, en 1123, aux habitants, une charte rédigée en langue romane ; cette charte leur fut renouvelée, en 1183, par Raoul Ier, sire de Coucy, avant son départ pour la croisade. Vervins fut plusieurs fois prise et reprise par les Anglais et les Français, pendant la guerre de Cent ans ; Louis XI et Charles le Téméraire y conclurent en 1475 le traité que l’on appela les trêves marchandes, première ébauche des traités de commerce internationaux. Plusieurs fois prise ou dévastée par les Espagnols pendant les guerres du XVIe siècle avec la maison d’Autriche, elle est célèbre par le traité signé en 1598 entre Henri IV et Philippe II, traité qui assurait la Picardie à la France et mettait fin à la guerre qui depuis plus de quarante années existait entre la France et l’empire.

Vervins est aujourd’hui une ville de 3,102 habitants, dont l’industrie et le commerce font toute la richesse ; elle fabrique des tissus de fil et de coton, des tricots de laine, des paniers d’osier et n’offre aux curieux que quelques restes de son ancien château, de ses fortifications et certaines parties de son église, notamment une porte romane.