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marques du linge de l’enfant pour qu’on ne le découvrît pas ; voici encore ces linges qui ont été gardés par l’excellente femme qui a généreusement élevé mon fils ; voulez-vous voir cette lettre ; voulez-vous voir ces linges ?

M. James Milligan resta un moment immobile, se demandant bien certainement s’il n’allait pas nous étrangler tous ; puis il se dirigea vers la porte ; mais prêt à sortir, il se retourna :

– Nous verrons, dit-il, ce que les tribunaux penseront de cette supposition d’enfant.

Sans se troubler, madame Milligan, – maintenant je peux dire ma mère, – répondit :

– Vous pouvez nous appeler devant les tribunaux ; moi je n’y conduirai pas celui qui a été le frère de mon mari.

La porte se referma sur mon oncle ; alors je pus me jeter dans les bras que ma mère me tendait et l’embrasser pour la première fois en même temps qu’elle m’embrassait elle-même.

Quand notre émotion se fut un peu calmée, Mattia s’approcha :

– Veux-tu répéter à ta maman que j’ai bien gardé son secret ? dit-il.

– Tu savais donc tout ? dis-je.

Ce fut ma mère qui répondit :

– Quand Mattia m’eut fait son récit, je lui recommandai le silence, car si j’avais la conviction que le pauvre petit Rémi était mon fils, il me fallait des preuves certaines que l’erreur n’était pas possible.