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car d’ordinaire elle était longue et perçante la nuit.

– Que nous importe cette lumière, dit-il, c’est une lampe qui brûle sur la table d’un travailleur ou bien près du lit d’un mourant, nous ne pouvons pas aller frapper à cette porte. Dans la campagne, pendant la nuit, nous pourrions demander l’hospitalité, mais aux environs de Paris on ne donne pas l’hospitalité. Il n’y a pas de maisons pour nous. Allons !

Pendant quelques minutes encore, nous marchâmes, puis il me sembla apercevoir un chemin qui coupait le nôtre, et au coin de ce chemin un corps noir qui devait être la tête d’épine. Je lâchai la main de Vitalis pour avancer plus vite. Ce chemin était creusé par de profondes ornières.

– Voilà l’épine ; il y a des ornières.

– Donne-moi la main, nous sommes sauvés, la carrière est à cinq minutes d’ici ; regarde bien, tu dois voir le bouquet d’arbres.

Il me sembla voir une masse sombre, et je dis que je reconnaissais les arbres.

L’espérance nous rendit l’énergie, mes jambes furent moins lourdes, la terre fut moins dure à mes pieds.

Cependant les cinq minutes annoncées par Vitalis me parurent éternelles.

– Il y a plus de cinq minutes que nous sommes dans le bon chemin, dit-il en s’arrêtant.

– C’est ce qui me semble.

– Où vont les ornières.