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SANS FAMILLE

On nous indiqua l’adresse de l’oncle Gaspard ; il demeurait à une petite distance de la mine, dans une rue tortueuse et escarpée qui descendait de la colline à la rivière.

Quand je le demandai, une femme, qui était adossée à la porte, causant avec une de ses voisines, adossée à une autre porte, me répondit qu’il ne rentrerait qu’à six heures, après le travail.

— Qu’est-ce que vous lui voulez ? dit-elle.

— Je veux voir Alexis.

Alors elle me regarda de la tête aux pieds, et elle regarda Capi.

— Vous êtes Rémi ? dit-elle. Alexis nous a parlé de vous ; il vous attendait. Quel est celui-ci ?

Elle montra Mattia.

— C’est mon camarade.

C’était la tante d’Alexis. Je crus qu’elle allait nous engager à entrer et à nous reposer, car nos jambes poudreuses et nos figures hâlées par le soleil, criaient haut notre fatigue ; mais elle n’en fit rien et me répéta simplement que si je voulais revenir à six heures, je trouverais Alexis, qui était à la mine.

Je n’avais pas le cœur à demander ce qu’on ne m’offrait pas ; je la remerciai de sa réponse, et nous allâmes par la ville, à la recherche d’un boulanger, car nous avions grand’faim, n’ayant pas mangé depuis le petit matin, et encore une simple croûte qui nous était restée sur notre dîner de la veille. J’étais honteux aussi de cette réception, car je sentais que Mattia se demandait ce qu’elle signifiait. À quoi bon faire tant de lieues ?