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SANS FAMILLE

t’emmener ; ne crains rien ; deux jours après nous serons en France ; bon courage et bon espoir ; surtout élance-toi au loin en sautant et tombe sur tes pieds. »

Sauvé ! Je ne comparaîtrais pas aux assises ; je ne verrais pas ce qui s’y passerait !

Ah ! le brave Mattia, le bon Bob ! car c’était lui, j’en étais certain, qui aidait généreusement Mattia : « Nous serons là avec un bon cheval ; » ce n’était pas Mattia qui tout seul avait pu combiner cet arrangement.

Et je relus le billet : « Quarante-cinq minutes après le départ ; le talus de gauche ; tomber sur les pieds. » Certes oui, je m’élancerais bravement, dussé-je me tuer. Mieux valait mourir que de se faire condamner comme voleur.

Ah ! comme tout cela était bien inventé :

« Deux jours après nous serons en France. »

Cependant, dans mon transport de joie, j’eus une pensée de tristesse : et Capi ? Mais bien vite j’écartai cette idée. Il n’était pas possible que Mattia voulût abandonner Capi ; s’il avait trouvé un moyen pour me faire évader, il en avait trouvé un aussi certainement pour Capi.

Je relus mon billet deux ou trois fois encore, puis, l’ayant mâché, je l’avalai ; maintenant je n’avais plus qu’à dormir tranquillement ; et je m’y appliquai si bien, que je ne m’éveillai que quand le geôlier m’apporta à manger.

Le temps s’écoula assez vite et le lendemain, dans l’après-midi, un policeman que je ne connaissais pas