Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/322

Cette page a été validée par deux contributeurs.
314
SANS FAMILLE

Et quand Mattia voulait me faire part de ses doutes, il était de mon devoir de lui imposer silence.

C’était ce que j’essayais, mais Mattia avait sa tête, et je ne parvenais pas toujours à triompher de son obstination.

— Cogne si tu veux, disait-il en se fâchant, mais écoute.

Et alors il me fallait quand même écouter ses questions :

— Pourquoi Allen, Ned, Annie et Kate avaient-ils les cheveux blonds, tandis que les miens n’étaient pas blonds ?

— Pourquoi tout le monde, dans la famille Driscoll, à l’exception de Kate, qui ne savait pas ce qu’elle faisait, me témoignait-il de mauvais sentiments, comme si j’avais été un chien galeux ?

— Comment, des gens qui n’étaient pas riches habillaient-ils leurs enfants avec des dentelles ?

À tous ces pourquoi, à tous ces comment, je n’avais qu’une bonne réponse qui était elle-même une interrogation.

— Pourquoi la famille Driscoll m’aurait-elle cherché si je n’étais pas son enfant ? Pourquoi aurait-elle donné de l’argent à Barberin et à Greth and Galley ?

À cela Mattia était obligé de répondre qu’il ne pouvait pas répondre.

Mais cependant il ne se déclarait pas vaincu.

— Parce que je ne peux pas répondre à ta question, disait-il, cela ne prouve pas que j’aie tort dans toutes celles que je te pose sans que tu y répondes toi-même. Un autre à ma place trouverait très-bien pour-