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SANS FAMILLE

de l’eau-de-vie de genièvre et aussi des eaux-de-vie de toutes sortes, qui, les unes comme les autres, ont pour même origine l’alcool de grain ou de betterave.

— Psit ! psit ! fait notre guide.

Et nous entrons avec lui dans ce gin palace. Décidément, nous avons eu tort de croire que nous étions dans un misérable quartier ; je n’ai jamais vu rien de plus luxueux ; partout des glaces et des dorures, le comptoir est en argent. Cependant, les gens qui se tiennent debout devant ce comptoir ou appuyés de l’épaule contre les murailles ou contre les tonneaux, sont déguenillés, quelques-uns n’ont pas de souliers, et leurs pieds nus qui ont pataugé dans la boue des cloaques, sont aussi noirs que s’ils avaient été cirés avec un cirage qui n’aurait pas encore eu le temps de sécher.

Sur ce beau comptoir en argent, notre guide se fait servir un verre d’une liqueur blanche qui sent bon, et, après l’avoir vidé d’un trait avec l’avidité qu’il mettait, quelques instants auparavant, à avaler le brouillard, il engage une conversation avec l’homme aux bras nus jusqu’au coude qui l’a servi.

Il n’est pas bien difficile de deviner qu’il demande son chemin, et je n’ai pas besoin d’interroger Mattia.

De nouveau nous cheminons sur les talons de notre guide ; maintenant la rue est si étroite que malgré le brouillard nous voyons les maisons qui la bordent de chaque côté ; des cordes sont tendues en l’air de l’une à l’autre de ces maisons, et çà et là des linges et des haillons pendent à ces cordes. Assurément ce n’est pas pour sécher qu’ils sont là.