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SANS FAMILLE

Je n’avais pas lu le dernier mot de cette lettre que Mattia se leva en faisant un saut.

— En avant pour Londres ! cria-t-il.

J’étais tellement surpris de ce que je venais de lire, que je regardai Mattia sans bien comprendre ce qu’il disait.

— Puisque la lettre de Barberin dit que ce sont des gens de loi anglais qui sont chargés de te retrouver, continua-t-il, cela signifie, n’est-ce pas, que tes parents sont Anglais.

— Mais…

— Cela t’ennuie, d’être Anglais ?

— J’aurais voulu être du même pays que Lise et les enfants.

— Moi j’aurais voulu que tu fusses Italien.

— Si je suis Anglais, je serai du même pays qu’Arthur et madame Milligan.

— Comment, si tu es Anglais ? mais cela est certain ; si tes parents étaient Français ils ne chargeraient point, n’est-ce pas, des gens de loi anglais de rechercher en France l’enfant qu’ils ont perdu. Puisque tu es Anglais, il faut aller en Angleterre. C’est le meilleur moyen de te rapprocher de tes parents.

— Si j’écrivais à ces gens de loi ?

— Pourquoi faire ? On s’entend bien mieux en parlant qu’en écrivant. Quand nous sommes arrivés à Paris, nous avions 17 francs ; nous avons fait un jour 14 francs de recette, puis 11, puis 9, cela donne 51 francs, sur quoi nous avons dépensé 8 francs ; il nous reste donc 43 francs, c’est plus qu’il en faut pour aller à Londres ; on s’embarque à Boulogne sur des