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SANS FAMILLE

parler de Lise, d’Alexis et de mon ensevelissement dans la mine.

— Quel terrible métier ! dit-il, quand je fus arrivé au bout de mon récit, et c’est celui de mon pauvre Alexis ; ah ! comme il était plus heureux à cultiver les giroflées.

— Cela reviendra, dis-je.

— Dieu t’entende, mon petit Rémi !

La langue me démangea pour lui dire que mes parents le feraient bientôt sortir de prison, mais je pensai à temps qu’il ne convenait point de se vanter à l’avance des joies que l’on se proposait de faire, et je me contentai de l’assurer que bientôt il serait en liberté avec tous ses enfants autour de lui.

— En attendant ce beau moment, me dit Mattia lorsque nous fûmes dans la rue, mon avis est que nous ne perdions pas notre temps et que nous gagnions de l’argent.

— Si nous avions employé moins de temps à gagner de l’argent en venant de Chavanon à Dreuzy et de Dreuzy à Paris, nous serions arrivés assez tôt à Paris pour voir Barberin.

— Cela c’est vrai, et je me reproche assez moi-même de t’avoir retardé, pour que tu ne me le reproches pas, toi.

— Ce n’est pas un reproche, mon petit Mattia, je t’assure ; sans toi je n’aurais pas pu donner à Lise sa poupée, et sans toi nous serions en ce moment sur le pavé de Paris, sans un sou pour manger.

— Eh bien alors, puisque j’ai eu raison de vouloir gagner de l’argent, faisons comme si j’avais encore