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SANS FAMILLE

Il se mit à courir pour arriver plus vite près de moi ; en quelques paroles pressées je lui racontai ce que j’avais fait, et ce que j’avais appris.

Alors il montra un chagrin qui me fut bien doux au cœur et je sentis que s’il craignait tout de ma famille pour lui, il n’en désirait pas moins, sincèrement, pour moi, que je trouvasse mes parents.

Par de bonnes paroles affectueuses il tâcha de me consoler et surtout de me convaincre qu’il ne fallait pas désespérer.

— Si tes parents ont bien trouvé Barberin, ils s’inquiéteront de ne pas entendre parler de lui ; ils chercheront ce qu’il est devenu et tout naturellement ils arriveront à l’hôtel du Cantal ; allons donc à l’hôtel du Cantal, c’est quelques jours de retard, voilà tout.

C’était déjà ce que m’avait dit la vieille femme à la tête branlante, cependant dans la bouche de Mattia ces paroles prirent pour moi une tout autre importance : évidemment il ne s’agissait que d’un retard ; comme j’avais été enfant de me désoler et de désespérer !

Alors, me sentant un peu plus calme, je racontai à Mattia ce que j’avais appris sur Garofoli.

— Encore trois mois ! s’écria-t-il.

Et il se mit à danser un pas au milieu de la rue, en chantant.

Puis, tout à coup s’arrêtant et venant à moi :

— Comme la famille de celui-ci n’est pas la même chose que la famille de celui-là ! voilà que tu te désolais parce que tu avais perdu la tienne, et moi voilà que je chante parce que la mienne est perdue.

— Un oncle, ce n’est pas la famille, c’est-à-dire un