Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/217

Cette page a été validée par deux contributeurs.
209
SANS FAMILLE

que mère Barberin savait, c’était que son homme était à Paris ; depuis son départ il n’avait point écrit, pas plus qu’il n’avait envoyé de ses nouvelles par quelque compatriote, quelque maçon revenant au pays : ces attentions amicales n’étaient point dans ses habitudes.

Où était-il, où logeait-il ? elle ne le savait pas précisément et de façon à pouvoir lui adresser une lettre, mais il n’y avait qu’à le chercher chez deux ou trois logeurs du quartier Mouffetard dont elle connaissait les noms, et on le trouverait certainement chez l’un ou chez l’autre.

Je devais donc partir pour Paris et chercher moi-même celui qui me cherchait.

Assurément c’était pour moi une joie bien grande, bien inespérée d’avoir une famille ; cependant cette joie dans les conditions où elle m’arrivait, n’était pas sans un mélange d’ennuis et même de chagrin.

J’avais espéré que nous pourrions passer plusieurs jours tranquilles, heureux, auprès de mère Barberin, jouer à mes anciens jeux avec Mattia, et voilà que le lendemain même, nous devions nous remettre en route.

En partant de chez mère Barberin, je devais aller au bord de la mer, à Esnandes, voir Étiennette, — il me fallait donc maintenant renoncer à ce voyage et ne point embrasser cette pauvre Étiennette qui avait été si bonne et si affectueuse pour moi.

Après avoir vu Étiennette je devais aller à Dreuzy, dans la Nièvre, pour donner à Lise des nouvelles de son frère et de sa sœur, — il me fallait donc aussi re-