— Je vois bien ; mais ce n’est pas des crêpes que tu vas donner à manger à un homme qui a dix lieues dans les jambes.
— C’est que je n’ai rien : nous ne t’attendions pas.
— Comment rien ; rien à souper ?
Il regarda autour de lui.
— Voilà du beurre.
Il leva les yeux au plafond à l’endroit où l’on accrochait le lard autrefois ; mais depuis longtemps le crochet était vide ; et à la poutre pendaient seulement maintenant quelques glanes d’ail et d’oignon.
— Voilà de l’oignon, dit-il, en faisant tomber une glane avec son bâton ; quatre ou cinq oignons, un morceau de beurre et nous aurons une bonne soupe. Retire ta crêpe et fricasse-nous les oignons dans la poêle.
Retirer la crêpe de la poêle ! mère Barberin ne répliqua rien. Au contraire elle s’empressa de faire ce que son homme demandait tandis que celui-ci s’asseyait sur le banc qui était dans le coin de la cheminée.
Je n’avais pas osé quitter la place où le bâton m’avait amené, et, appuyé contre la table, je le regardais.
C’était un homme d’une cinquantaine d’années environ, au visage rude, à l’air dur ; il portait la tête inclinée sur l’épaule droite par suite de la blessure qu’il avait reçue, et cette difformité contribuait à rendre son aspect peu rassurant.
Mère Barberin avait replacé la poêle sur le feu.
— Est-ce que c’est avec ce petit morceau de beurre que tu vas nous faire la soupe ? dit-il.