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EN FAMILLE.

route de Charonne au Marché aux chevaux, lui monta sur le dos en se servant d’une chaise ; mais comme Perrine le tenait par la tête et lui parlait cette surprise n’alla pas jusqu’à la résistance : Grain de Sel d’ailleurs n’était-il pas un ami ?

Ils partirent ainsi, Palikare marchant gravement, conduit par Perrine et à travers des rues, où il n’y avait que peu de voitures et de passants, ils arrivèrent à un pont très large, aboutissant à un grand jardin.

« C’est le Jardin des Plantes, dit Grain de Sel, je suis sûr qu’ils n’ont pas un âne comme le tien.

— Alors on pourrait peut-être le leur vendre », dit Perrine pensant que dans un jardin zoologique les bêtes n’ont qu’à se promener.

Mais Grain de Sel n’accueillit pas cette idée :

« Des affaires avec le gouvernement, dit-il, il n’en faut pas… parce que le gouvernement… »

Il n’avait pas la confiance de Grain de Sel, le gouvernement.

Maintenant la circulation des voitures et des tramways était si active que Perrine avait besoin de toute son attention pour se diriger au milieu de leur encombrement, aussi n’avait-elle d’yeux ni d’oreilles pour rien autre chose, ni pour les monuments devant lesquels ils passaient, ni pour les plaisanteries que les charretiers et les cochers leur adressaient, mis en gaieté et en esprit par l’attitude de Grain de Sel sur l’âne. Mais lui, qui n’avait pas les mêmes préoccupations, n’était pas embarrassé pour leur répondre joyeusement, et cela faisait sur leur parcours un concert de cris