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EN FAMILLE.

Théodore ! Quel malheur si un esprit borné comme Casimir en prenait la direction ! Et aucune des deux familles n’avait la pensée d’admettre qu’une association fût possible, qu’un partage pût se faire entre les deux cousins : on voulait tout pour soi ; l’autre n’aurait rien : quels droits d’ailleurs avait-il à faire valoir cet autre ?

Perrine s’attendait à la visite matinale de Mme Bretoneux, et aussi à celle de Mme Paindavoine ; mais elle ne reçut ni l’une ni l’autre, ce qui lui fit comprendre qu’on ne croyait plus avoir besoin d’elle, au moins pour le moment. Qu’était-elle en effet dans cette maison ? Maintenant c’était le frère de M. Vulfran, sa sœur, ses neveux, ses nièces, ses héritiers enfin, qui y étaient les maîtres.

Elle s’attendait aussi à ce que M. Vulfran l’appellerait pour qu’elle le conduisît à l’église, comme elle le faisait tous les dimanches depuis qu’elle avait remplacé Guillaume ; mais il n’en fut rien, et quand les cloches, qui depuis la veille sonnaient des glas de quart d’heure en quart d’heure, annoncèrent la messe, elle le vit monter en landau appuyé sur le bras de son frère, accompagné de sa sœur et de sa belle-sœur, tandis que les membres de la famille prenaient place dans les autres voitures.

Alors n’ayant pas de temps à perdre, elle qui devait faire à pied le trajet du château à l’église, elle partit au plus vite.

Elle quittait une maison sur laquelle la Mort avait étendu son linceul ; elle fut surprise en traversant à la hâte les rues du village, de remarquer qu’elles avaient leur air des dimanches, c’est-à-dire que les cabarets étaient pleins d’ouvriers