Page:Malot - En famille, 1893.djvu/418

Cette page a été validée par deux contributeurs.
412
EN FAMILLE.

Mais qu’elle montrât la même curiosité pour les intrigues des neveux et celles de Talouel, dont on parlait dans le village, voilà qui certainement ne serait pas admissible. Est-ce que ces choses-là regardent les petites filles ? Est-ce un sujet de conversation entre une maîtresse et son élève ? Est-ce avec des histoires et des bavardages de ce genre qu’on forme le caractère d’une enfant ?

Elle aurait donc dû renoncer à tirer quoi que ce fût de l’institutrice à cet égard, si une visite à Maraucourt de Mme  Bretoneux, la mère de Casimir, n’était venue ouvrir les lèvres de Mlle  Belhomme, qui seraient certainement restées closes.

Avertie de cette visite par M. Vulfran, Perrine en fit part à Mlle  Belhomme en lui disant que la leçon du lendemain serait peut-être dérangée, et, du moment où elle eut reçu cette nouvelle l’institutrice montra une préoccupation tout à fait extraordinaire chez elle, car c’était une de ses qualités de ne se laisser distraire par rien, et de tenir son élève constamment en main comme le cavalier qui doit faire franchir à sa monture un passage périlleux tout plein de dangers.

Qu’avait-elle donc ? Ce fut seulement peu de temps avant son départ, que Perrine eut une réponse à cette question qui vingt fois s’était posée à son esprit.

« Ma chère enfant, dit Mlle  Belhomme en baissant la voix, je dois vous donner le conseil de vous montrer discrète et réservée demain avec la dame dont la visite vous est annoncée.

— Discrète, à propos de quoi ? réservée en quoi et comment ?