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EN FAMILLE.

guérir la bronchite, et d’autre part il fallait que tous les autres accidents disparussent. Or, M. Vulfran était un détestable malade qui commettait imprudence sur imprudence, et se refusait à suivre exactement les prescriptions du médecin. À la vérité cela ne lui était pas toujours facile : comment pouvait-il rester calme, ainsi que le recommandait M. Ruchon, quand la disparition de son fils et les recherches qu’il faisait faire à ce sujet, le jetaient à chaque instant dans des accès d’inquiétude ou de colère, qui engendraient une fièvre constante dont il ne se guérissait que par le travail ? Tant qu’il ne serait pas fixé sur le sort de son fils, il n’y aurait pas de chance pour l’opération, et on la différerait. Plus tard deviendrait-elle possible ? On n’en savait rien, et on resterait dans cette incertitude tant que par des bons soins l’état de M. Vulfran ne serait pas assez assuré pour décider les oculistes.

Mettre Mlle Belhomme sur le compte de M. Vulfran et la faire parler était en somme assez facile pour Perrine, mais il n’en avait pas été de même lorsqu’elle avait voulu compléter ce que la conversation de Fabry et de Mombleux lui avait appris sur les secrètes espérances des neveux, aussi bien que sur celles de Talouel. Ce n’était point une sotte que l’institutrice, il s’en fallait de tout, et elle ne se laisserait interroger ni directement ni indirectement sur un pareil sujet.

Que Perrine fût curieuse de savoir ce qu’était la maladie de M. Vulfran, dans quelles conditions elle s’était produite, et quelles chances il y avait pour qu’il recouvrât la vue un jour ou ne la recouvrât point, il n’y avait rien que de naturel et même de légitime à ce qu’elle se préoccupât de la santé de son bienfaiteur.