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EN FAMILLE.

envoyer une lettre pour un de nos pères dont le concours pourrait peut-être les faciliter. »

Enfin elle était terminée, la terrible lettre, et tout de suite après le dernier mot écrit, sans même traduire la formule de politesse de la fin, elle ramassa les feuillets et se rendit vivement auprès de M. Vulfran qu’elle trouva marchant d’un bout à l’autre de son cabinet en comptant les pas, autant pour ne pas aller donner contre la muraille que pour tromper son impatience.

« Tu as été bien lente, dit-il.

— La lettre est longue et difficile.

— N’as-tu pas été dérangée aussi ? J’ai entendu la porte de ton bureau s’ouvrir et se fermer deux fois. »

Puisqu’il l’interrogeait, elle crut qu’elle devait répondre sincèrement : peut-être était-ce la seule solution honnête et juste aux questions qu’elle avait agitées sans leur trouver de réponses satisfaisantes :

« M. Théodore et M. Talouel sont venus dans mon bureau.

— Ah ! »

Il parut vouloir s’engager sur ce point, mais s’arrêtant, il reprit :

« La lettre d’abord ; nous verrons cela ensuite ; assieds-toi près de moi, et lis lentement, distinctement, sans hausser la voix. »

Elle fit sa lecture comme il lui était commandé, et d’une voix plutôt faible que forte.

De temps en temps M. Vulfran l’interrompit, mais sans s’adresser à elle, en suivant sa pensée :