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EN FAMILLE.

— Il est certain qu’à ce moment il pouvait ne pas prévoir que d’autres hériteraient de la place du disparu ; mais maintenant que cette place est occupée, quelles espérances peut-il garder ?

— Quand ce ne serait que celle que cette occupation n’est pas aussi solide qu’elle en a l’air. Et de fait est-elle si solide que ça ?

— Vous croyez…

— J’ai cru en arrivant ici qu’elle l’était ; mais depuis j’ai vu par bien des petites choses, que vous avez pu remarquer vous-même, qu’il se fait un travail souterrain à propos de tout, comme à propos de rien, qu’on devine, plutôt qu’on ne le suit, dont le but certainement est de rendre cette occupation intolérable. Y parviendra-t-on ? D’un côté arrivera-t-on à leur rendre la vie tellement insupportable qu’ils préfèrent, de guerre lasse, se retirer ? De l’autre trouvera-t-on moyen de les faire renvoyer ? Je n’en sais rien.

— Renvoyer ! Vous n’y pensez pas.

— Évidemment s’ils ne donnent pas prise à des attaques sérieuses, ce sera impossible. Mais si dans la confiance que leur inspire leur situation ils ne se gardent pas ; s’ils ne se tiennent pas toujours sur la défensive ; s’ils commettent des fautes, et qui n’en commet pas ? alors surtout qu’on est tout-puissant et qu’on a lieu de croire l’avenir assuré, je ne dis pas que nous n’assisterons pas à des révolutions intéressantes.

— Pas intéressantes pour moi les révolutions, vous savez.

— Je ne crois pas que j’aurais plus que vous à y gagner ; mais que pouvons-nous contre leur marche ? Prendre parti