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EN FAMILLE.

« Puisque vous remplacez Bendit, continua Mombleux, qui pour l’obstination n’était pas à moitié Picard.

— Dites que mademoiselle tient sa place, reprit Fabry.

— C’est la même chose.

— Pas du tout, car dans une dizaine, une quinzaine de jours, quand M. Bendit sera rétabli, il la reprendra cette place, ce qui ne serait pas arrivé, si mademoiselle ne s’était pas trouvée là pour la lui garder.

— Il me semble que vous de votre côté, moi du mien, nous avons contribué à la lui garder.

— Comme mademoiselle du sien ; ce qui fait que M. Bendit nous devra une chandelle à tous les trois, si tant est qu’un Anglais ait jamais employé les chandelles autrement que pour son propre usage. »

Si Perrine avait pu se méprendre sur le sens vrai des paroles de Mombleux, la façon dont on agit avec elle chez mère Françoise, la renseigna, car ce ne fut pas à la table des pensionnaires qu’elle trouva son couvert mis, comme on eût fait pour une camarade, mais sur une petite table à part, qui, pour être dans leur salle, ne s’en trouvait pas moins reléguée dans un coin, et ce fut là qu’on la servit après eux, ne lui passant les plats qu’en dernier.

Mais il n’y avait là rien pour la blesser ; que lui importait d’être servie la première ou la dernière, et que les bons morceaux eussent disparu ? Ce qui l’intéressait, c’était d’être placée assez près d’eux pour entendre leur conversation, et par ce qu’ils diraient de tâcher de se tracer une ligne de conduite au milieu des difficultés qu’elle allait affronter. Ils connaissaient les habitudes de la maison ; ils connaissaient M. Vulfran,