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EN FAMILLE.

que c’était la plus simple, et la moins difficile à exécuter pour elle qui n’avait jamais taillé des chemises, et manquait de ciseaux, et puis parce qu’elle pourrait faire servir à la nouvelle le cordon de l’ancienne.

Tant qu’il ne s’agit que de couture, les choses marchèrent à souhait, sinon de façon à s’admirer dans son travail, au moins assez bien pour ne pas le recommencer. Mais où les difficultés et les responsabilités se présentèrent, ce fut au moment de tailler les ouvertures pour la tête et les bras, ce qui, avec son couteau et le billot pour seuls outils, lui paraissait si grave, que ce ne fut pas sans trembler un peu qu’elle se risqua à entamer l’étoffe. Enfin, elle en vint à bout, et le mardi matin elle put s’en aller à l’atelier habillée d’une chemise gagnée par son travail, taillée et cousue de ses mains.

Ce jour-là, quand elle se présenta chez mère Françoise, ce fut Rosalie qui vint au-devant d’elle le bras en écharpe.

« Guérie !

— Non, seulement on me permet de me lever et de sortir dans la cour. »

Tout à la joie de la voir, Perrine continua de la questionner, mais Rosalie ne répondait que d’une façon contrainte.

Qu’avait-elle donc ?

À la fin elle lâcha une question qui éclaira Perrine :

« Où donc logez-vous maintenant ? »

N’osant pas répondre, Perrine se jeta à côté :

« C’était trop cher pour moi, il ne me restait rien pour ma nourriture et mon entretien.

— Est-ce que vous avez trouvé à meilleur prix autre part ?