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tion au contraire qu’il lui fallait, c’était le travail qu’elle aimait, et ce qui la passionnait c’étaient les affaires, c’était le commerce pour les émotions et les orgueilleuses satisfactions qu’ils donnent avec le succès.

Il était venu ce succès, grand, complet, superbe, et à mesure qu’étaient arrivées les médailles et les décorations, à mesure qu’avait grossi le chiffre des inventaires, les satisfactions orgueilleuses étaient venues aussi, de sorte que d’années en années le mari et la femme, avaient été de plus en plus fiers de leur nom : Haupois-Daguillon, c’était tout dire.

Deux enfants étaient nés de leur mariage, une fille, l’aînée, et, par une grâce vraiment providentielle, un fils qui continuerait la dynastie des Daguillon.

Mais les rêves ou les projets des parents ne s’accordent pas toujours avec la réalité. Bien que ce fils eût été élevé en vue de diriger un jour la maison de la rue Royale et de devenir un vrai Daguillon, il n’avait montré aucune disposition à réaliser les espérances de ses parents, et la gloire de sa maison avait paru n’exercer aucune influence, aucun mirage sur lui.

Cette froideur s’était manifestée dès son enfance ; et alors qu’il suivait les cours du lycée Bonaparte et qu’il venait le jeudi ou pendant les vacances passer quelques heures dans les magasins, on ne l’avait jamais vu prendre intérêt à ce qui se faisait ni à ce qui se disait autour de lui. Combien était sensible la différence entre la mère et le fils, car les distractions les plus agréables de son enfance, c’était dans ce magasin que mademoiselle Daguillon les avait trouvées, écoutant, regardant curieusement les clients, admirant les pièces d’orfèvrerie exposées dans les vitrines, et la plus heu-