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— J’ai résisté tant que j’ai pu, dit-il, mais il n’y avait plus moyen de rester à la mer, exeusez-moi, mamzelle.

Madeleine inclina la tête.

— Faut pas que cela vous désole, continua Pécune, c’est un bon vent pour votre malheureux, il porte à le côte ; soyez sure que demain ou après-demain il doit aborder.

Comme elle levait la main avec un signe d’incrédulité et de désespérance, Pécune se pencha vers elle, et d’une voix basse :

— Croyez-moi, mamzelle, quand je vous dis que le neuvième jour les noyés qui n’ont pas été retrouvés se lèvent eux-mêmes dans la mer et se mettent en marche pour venir se coucher dans la terre bénite ; s’ils ne sont pas trop loin ou si le vent est favorable ils abordent ; ils ne restent en route que si le chemin à faire est trop long ou si le vent leur est contraire. Vous Voyez bien que le vent est bon présentement. Rentrez chez vous, mamzelle, et mettez des draps blancs au lit de votre pauvre père.

Le vent continua de souffler du nord pendant trente-six heures, puis il faiblit mais sans tomber complétement.

Le matin du neuvième jour Léon vit arriver l’homme qui avait la garde du rivage de Bernières : M. Haupois venait d’aborder sur la grève, selon la prédiction de Pécune.

L’enterrement eut lieu le même jour à trois heures de l’après-midi, et le soirLéon monta avec Madeleine dans le train qui arrive à Paris à cinq heures du matin.

Pendant ces neuf jours il avait exécuté l’acte de dernière volonté de son oncle, il était resté près de Made-