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bras ; tout à coup elle s’arrêta, et, lui tendant la main :

— Tu es bon, dit-elle.

Il garda cette main dans la sienne, puis la plaçant sous son bras, il se remit en marche se dirigeant vers Bernières.

— Je n’ai pas voulu parler de toi jusqu’à présent, dit-il, de moi, ni de nous ; c’était à un autre que nous devions être entièrement d’esprit et de cœur ; mais il faut que tu saches que tu n’es pas seule au monde, chère Madeleine, et que tu as un frère.

Elle tourna vers lui son visage convulsé, et dans ses yeux hagards, quelques instants auparavant, il vit rouler des larmes d’attendrissement.

Il continua.

— Dans mon père, dans ma mère, dans ma sœur, sois certaine que tu trouveras une famille, sois certaine aussi que le différend survenu si malheureusement entre nos parents n’a altéré en rien les sentiments de mon père ; il m’a toujours parlé de toi avec tendresse, et s’il était ici il te tiendrait ce langage avec plus d’autorité seulement, mais non avec plus d’amitié, avec plus d’affection ; notre maison est la tienne.

— Je voudrais rester ici, dit-elle.

— Assurément nous y resterons tant que cela sera nécessaire, j’y resterai avec toi ; tu comprends bien que je ne te parle pas d’aujourd’hui.

— Je comprends, je sens que tu es la bonté même, mais tout le reste je le comprends mal, pardonne-moi, mon esprit est ailleurs.

Disant cela, elle détourna les yeux et par un mouvement rapide elle les jeta sur la ligne blanche des vagues qui frappaient le rivage.