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VIII

En sortant de la rue Auber, il gagna les boulevards, puis les quais ; il avait besoin de marcher ; la colère grondait dans son cœur et dans sa tête, la fièvre bouillonnait dans ses veines, il fallait qu’il calmât l’une et qu’il usât l’autre par le mouvement.

Il alla ainsi à grands pas, droit devant lui, sans rien voir, sans savoir où il était pendant près de deux heures. Puis, se trouvant sur la place de la Concorde, l’idée lui vint d’entrer rue de Rivoli ; il savait par Madeleine que son ancien appartement était dans l’état où il l’avait quitté ; il s’y installerait, et ce serait fini, bien fini avec Cara. S’il avait eu sa clef, il aurait réalisé cette idée ; mais, à la pensée d’aller sonner à la porte de son père pour demander cette clef à Jacques, un mouvement de fausse honte le retint : ce n’était pas ainsi qu’il devait rentrer chez lui, s’il y rentrait.

Depuis longtemps, il n’avait point osé passer rue Royale, mais à cette heure il n’avait point à craindre la rencontre d’un employé. Arrivé devant la maison de son père, il vit une faible lumière à une fenêtre, celle du bureau de ses parents ; sa mère était là penchée sur ses livres, travaillant encore : pauvre femme ! et une douloureuse émotion le serra à la gorge.

Il continua sa marche jusqu’à la gare Saint-Lazare,