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— Tu as vu mes parents ? demanda-t-il.

— Oui ; M. Byasson est venu me prendre pour me conduire chez eux.

— Alors, je n’ai rien à t’apprendre.

— Ce n’était pas cela que je voulais te demander, puisque, tu le devines bien, tes parents m’ont parlé de toi ; je te disais que je me trouvais assez heureuse dans ma position, et je te demandais tout naturellement, affectueusement : et toi ?

Il lui tendit la main :

— Oui, dit-il, tu as raison ; je dois te répondre franchement, car c’est l’amitié qui inspire ta question.

Cependant, bien qu’il annonçât qu’il voulait répondre, il resta pendant assez longtemps silencieux, la tête basse :

— Eh bien ! non, dit-il enfin, non, ma chère Madeleine, je ne suis pas heureux. Le bonheur pour moi aurait été dans la vie de famille, avec la femme aimée, avec des enfants qui auraient été ceux de mon père et de ma mère. C’était là le rêve que j’avais fait quand j’étais jeune… il y a trois ans. La fatalité a voulu qu’il ne se réalisât point. Je n’ai pas d’enfants. Je n’aurai pas de famille. Mais je dois accepter sans me plaindre la vie que je me suis faite.

Il se leva brusquement, comme s’il avait peur de se laisser entraîner à en dire davantage.

— Je te verrai bientôt, dit-il.

— Quand tu voudras ; tous les jours, tu peux venir le matin avant que je sois prise par le théâtre. Et quand veux-tu m’entendre ? Faut-il dire que je serais heureuse de chanter pour toi ?

— Tu chantes ce soir ?