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— Mais comment t’es-tu décidée à entrer au théâtre, dit-il, quand tu m’avais promis de m’écrire ?

— Je t’ai écrit.

— Pour me dire que tu quittais la maison de mon père ; c’était avant de prendre cette résolution que tu devais m’écrire. Que ne l’as-tu fait !

Il prononça ces derniers mots avec un accent qui la remua jusqu’au plus profond de son cœur. Que de choses dans ces quelques paroles, que de regrets, que de reproches, que de douleurs !

— Tu ne pouvais venir à mon secours qu’en te mettant en opposition avec tes parents, et je n’ai pas voulu être la cause d’une rupture entre vous.

— Que n’est-elle survenue alors cette rupture, et à ton occasion !

Il s’arrêta brusquement ; puis, ayant passé sa main sur son front, il continua :

— Mais ce n’est pas de cela, ce n’est pas de nous qu’il s’agit ; il ne convient plus de parler de nous, c’est de toi, de toi seule ; dis-moi donc ce que tu as fait, où tu as été, où tu t’es cachée ? Ta lettre reçue, je suis accouru à Paris pour te chercher, j’ai été à Rouen, à Saint-Aubin. Revenu à Paris, j’ai même fait faire des recherches par la police, car je voulais te retrouver non-seulement pour toi, mais pour…

Il allait dire : « pour moi », il se retint et reprit :

— Je voulais te retrouver ; tu n’avais donc point pensé au chagrin, au désespoir que tu me causerais, oui, Madeleine, au désespoir, le mot n’est pas trop fort appliqué au sentiment… à l’affection que j’éprouvais pour toi. Mais voilà que je me laisse entraîner, ce n’est pas à moi de parler ; c’est à toi.