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avaient paralysé M. et madame Haupois-Daguillon, et chaque fois qu’ils avaient dû abandonner une part de leur autorité, c’était Saffroy qui s’en était emparé pour ne plus la céder. Il voyait le jour proche où il prendrait en main la direction entière de la maison. Léon marié par un vrai mariage avec Cara, M. et madame Haupois-Daguillon accablés, ne pourraient pas rester à Paris ; ils se retireraient sans aucun doute dans le calme de la campagne, à Noiseau ; alors qui hériterait de cette maison si ce n’est lui ? Qui se dévouerait si ce n’est lui ? Que venait faire Madeleine ? Que voulait-elle ? Qu’avait-il à craindre d’elle ?

Ces questions s’étaient à peine présentées à son esprit que Madeleine, ayant passé devant lui avec une courte inclination de tête, était entrée dans le bureau de M. et de madame Haupois-Daguillon.

— Voici mademoiselle Madeleine, dit Byasson, je lui ai fait part de vos désirs, et elle a voulu vous apporter elle-même sa réponse à vos propositions.

Puis, pendant que Madeleine embrassait son oncle et sa tante, — celle-ci la serrant avec effusion dans ses bras, — Byasson sortit en ayant soin de bien refermer la porte.

Après le premier moment donné aux embrassements, il y eut un temps d’embarras pour tous, qui, bien que court en réalité, leur parut long et pénible : ils ne disaient rien ; ils évitaient même de se regarder.

Ce fut M. Haupois qui rompit ce silence : il s’appuya le dos à la cheminée, et, mettant sa main dans son gilet comme s’il voulait prononcer un discours, il se tourna à demi vers Madeleine :

— Ma chère enfant, dit-il, je n’ai pas à revenir sur