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Byasson se tut ; mais, au lieu de répondre, Madeleine ne balbutia que quelques paroles à peu près inintelligibles ; alors il reprit :

— Je comprends votre trouble, mon enfant ; vos inquiétudes, vos angoisses, vos doutes, je les sens. J’admets très-bien qu’avant de me répondre, vous vous demandiez si celui que je vous propose pour mari est toujours digne de vous. Jamais craintes n’ont été mieux justifiées que les vôtres. Avant de vous engager, vous avez raison de vouloir voir ; je serais le premier à vous donner ce conseil. Aussi n’est-ce point un engagement immédiat et définitif que j’attends de vous ; ce n’est pas le oui sacramentel qu’on prononce à la mairie, c’est seulement, et pour le moment, votre aide et votre concours ; Voyez Léon, voyez-le, sachant à l’avance le danger qu’il court et comment il peut être sauvé, puis ensuite vous déciderez dans votre conscience et dans votre cœur, mon enfant.

— Mais je ne suis pas libre.

Ce mot abattit instantanément toutes les combinaisons de Byasson.

— Votre cœur… dit-il.

— Ce n’est pas de mon cœur que je parle, répondit-elle avec un sourire désolé, c’est de ma vie qui ne m’appartient pas, et qui, pour neuf années encore, est à celui qui a payé mon éducation musicale.

Byasson respira.

— Si ce n’est que cela qui vous retient, dit-il gaiement, quittez ce souci ; ce contrat qui vous lie à votre entrepreneur se déliera avec de l’argent, et il est juste que mes amis, qui n’ont pas voulu de vous parce que