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— J’étais si émue que je n’ai pu ajouter à cette émotion celle que votre visite m’aurait donnée ; j’avais besoin de calme, il me fallait aller jusqu’au bout sans défaillance, et j’avais peur de moi ; c’est chose si terrible de paraître devant ce public indifférent qui, en quelques minutes, peut vous condamner à une mort honteuse ; mais ne parlons pas de cela.

— Votre triomphe a été splendide.

— J’ai été heureuse. Mais dites-moi, je vous prie, comment se porte mon oncle, comment se porte ma tante ?

— Ils vont bien, quoique depuis votre départ ils aient été cruellement éprouvés ; quand vous les verrez, vous les trouverez bien vieillis ; votre oncle n’est plus le vieux beau qui montait si fièrement les Champs-Élysées, et votre tante n’a plus son activité d’autrefois ; mais vous ne me demandez pas de nouvelles de Léon ?

Parlant ainsi, il l’avait regardée en face ; il vit qu’elle pâlissait.

— J’ai lu les journaux, dit-elle en baissant les yeux.

— Ah ! vous savez ?

— Je sais ce que les journaux ont rapporté de ce procès, qui, je le comprends, a dû causer de terribles chagrins à mon oncle et à ma tante. Et lui… je veux dire Léon, comment a-t-il supporté cette crise ?

— Nous n’avons pas vu Léon depuis longtemps ; il a rompu toutes relations avec nous, et ses amis ont rompu toutes relations avec lui.

— Ah ! pauvre Léon !

— Que n’entend-il cette parole de sympathie ! elle lui serait douce.