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les yeux, en face de lui, et si près, que de son souffle elle lui faisait trembler la barbe.

Il voulut encore la prendre dans ses bras, mais doucement elle lui abaissa les mains qu’elle prit dans les siennes et qu’elle embrassa tendrement.

— Écoute-moi, dit-elle, je t’en prie, écoute-moi avec toute ton âme, sans distraction, sans pensée étrangère à ce qui nous occupe, car c’est ma vie que tu vas décider par un oui ou par un non ; écoute-moi.

Et de nouveau, se penchant en avant, elle lui baisa les mains, mais cette fois fiévreusement, passionnément.

— Ce qui m’avait trompé, dit-elle, c’était la pensée que je devais renoncer à devenir ta femme. Ta femme par un mariage légal avec consentement de tes parents et publications, oui, à cela je dois renoncer. Mais ta femme par un mariage religieux, sans consentement de tes parents, sans publications ; ta femme pour toi seul et pour Dieu ; oui, voilà ce que je dois poursuivre, voilà ce que Dieu exige, voilà ce que je te demande, voilà ce que tu m’accorderas, si tu m’aimes, voilà ce que je vais exiger de toi et ce qui amènerait notre séparation si tu me le refusais. Je t’ai demandé de m’écouter tout à l’heure, je te répète ma prière à tes genoux ; avant de parler, avant de répondre, avant de prononcer le oui ou non qui va décider notre vie à tous deux, notre bonheur ou notre malheur, comme tu voudras, écoute-moi jusqu’au bout.

Elle se laissa glisser à terre, et, jetant les bras autour de Léon, elle resta serrée contre lui, la tête levée, le regardant ardemment :

— Et ce que je te demande ce n’est rien qu’une marque