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de façon à n’arriver que progressivement à sa conclusion.

Tout à coup Léon releva la tête, et la regardant en face :

— As-tu vu ma mère ? dit-il.

— Non.

— As-tu vu quelqu’un envoyé par elle ?

— Personne.

— Lui as-tu écrit ?

— Tu es fou.

Comme elle ne connaissait pas la dépêche envoyée au banquier, elle se demandait ce que signifiaient ces étranges questions ; mais son plan étant tracé à l’avance, elle ne voulut pas s’en écarter :

— Ce que tu veux savoir, n’est-ce pas, dit-elle, c’est comment j’ai appris le rôle joué par Rouspineau en cette affaire. Tout simplement en l’interrogeant. J’avais, je l’avoue, été bien surprise par les demandes insolentes de Brazier et de Rouspineau. L’insistance de ces gens à te poursuivre me paraissait étrange et jusqu’à un certain point inexplicable. Tu n’es pas la premier fils de famille à qui ils ont prêté de l’argent : tu étais le premier à qui ils le réclamaient de cette façon. Le vendredi, veille de ton départ, Rouspineau, depuis longtemps déjà pressé par moi, se décida à parler. D’aveu en aveu, je lui arrachai ce que tu viens de lire, et, contre l’engagement que je pris de lui payer les deux billets que tu dois encore, il consentit à m’écrire ce papier. Ceci se passait le vendredi soir ; tu devais t’embarquer le samedi matin à Liverpool. Que faire ? Il m’était impossible de te rejoindre ; et, d’autre part, je n’osais t’envoyer une dépêche, craignant qu’elle fût interceptée