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de chambre entra portant dans ses bras une nappe, des assiettes et un verre, puis elle se mit à dresser le couvert sur une petite table.

— Tu manges donc ? demanda Léon.

— Oui, depuis deux jours, mais jusqu’à présent, j’ai mangé du bout des dents, le pain avait un goût de plâtre, il me semble aujourd’hui que j’ai presque faim, tu me guéris.

La femme de chambre, qui n’avait pu apporter tout ce qui était nécessaire en une seule fois, était sortie.

— Si j’osais ? dit madame Haupois.

— Quoi donc, maman ?

— Je te demanderais de dîner avec moi… si tu n’es pas attendu toutefois ; je suis sûre que je dînerais tout à fait bien si je t’avais là en face de moi, me servant.

Assurément, il était attendu ; et, comme il devait rentrer à cinq heures, il y avait déjà longtemps qu’Hortense s’exaspérait, car elle n’aimait pas attendre ; mais comment refuser une invitation faite dans ces termes ? comment partir quand sa mère lui disait qu’elle dînerait bien s’il était en face d’elle pour la servir ? Hortense elle-même lui dirait de rester, si elle était là ; il lui expliquerait comment il avait été retenu sans pouvoir la prévenir, et elle avait trop le sentiment de la famille pour ne pas comprendre qu’il avait dû accepter, elle était trop bonne pour se fâcher.

Il rencontra les yeux de sa mère ; leur expression anxieuse l’arracha à son irrésolution et à ses raisonnements.

— Mais certainement, dit-il, je dîne avec toi.

— Oh ! mon cher enfant !