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les passions peuvent entraîner les hommes, même ceux qui ont reçu les plus pures leçons d’honneur et de vertu ; aussi ne disons-nous jamais à l’avance qu’une chose est impossible, par cela seul qu’elle a les probabilités les plus sérieuses contre elle : au contraire, nous savons que tout est possible, même l’impossible, alors surtout qu’il s’agit de passion.

— La passion n’est pas la folie, s’écria M. Haupois-Daguillon. Assurément, le fou n’a pas la conscience de ses actions, et l’homme passionné a cette conscience ; le fou agit au hasard, sans savoir s’il fait le bien ou le mal, et l’homme passionné agit en sachant ce qu’il fait mais trop souvent il n’y a plus ni bien ni mal pour lui, il n’y a que satisfaction de sa passion ; on a dit : « l’homme s’agite et Dieu le mène », mais il faut dire aussi : « l’homme s’agite et ses passions le mènent. » Où la passion dont monsieur votre fils est possédé le conduira-t-elle ? Je n’en sais rien. Je veux espérer avec vous que ce ne sera pas à ce mariage dont M. Byasson se montre effrayé. Cependant, je dois vous dire que, si cette femme veut se faire épouser, elle est parfaitement capable d’arriver à ses fins. Je la connais, et je l’ai eue dans ce cabinet, à cette place même où vous êtes assis en ce moment, monsieur, — il adressa ces paroles à M. Haupois-Daguillon— à l’époque où elle était la maîtresse du duc de Carami. Effrayée, elle aussi, de voir son fils au mains de cette femme qui se faisait alors appeler Hortense de Lignon, madame la duchesse de Carami vint me trouver comme vous en ce moment, messieurs ; elle me demanda de sauver son fils, car il arrive bien souvent, trop souvent, hélas ! que des