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moyen d’arriver à ses fins : ce n’était pas dans des circonstances aussi graves qu’on pouvait se permettre de rien négliger ; le possible, l’impossible devaient être tentés.

Il connaissait à la préfecture de police un haut fonctionnaire sous la direction duquel se trouvaient les arrestations et les expulsions, ainsi que le service des mœurs. Il l’alla trouver, accompagné de M. Haupois-Daguillon, et il lui exposa son cas : le fils de son meilleur ami, Léon Haupois-Daguillon, était l’amant d’une femme connue sous le nom de Cara dans le monde de la galanterie, et cette femme menaçait de se faire épouser si on ne lui payait pas la somme d’un million ; dans ces conditions, que faire ? Le jeune homme était si aveuglé, si fasciné qu’il se pouvait très-bien qu’il se laissât entraîner à ce honteux mariage.

M. Haupois ne put pas laisser passer cette parole sans dire que pour lui il ne croyait pas ce mariage possible ; mais, bien que, jusqu’à un certain point, rassuré de ce côté, il n’en désirait pas moins voir finir une liaison déshonorante qui faisait son désespoir et celui de toute sa famille.

— Et qui vous fait espérer que ce mariage n’est pas possible ? demanda le fonctionnaire de la préfecture.

— Les idées d’honneur et de respect dans lesquelles mon fils a été élevé.

— Vous êtes heureux, monsieur, d’avoir vécu dans un monde où l’on croit à la toute-puissance de l’honneur et du respect, et d’être arrivé à votre âge sans avoir reçu de l’expérience de cruelles leçons. Pour nous, nos fonctions ne nous laissent pas ces illusions consolantes ; nous voyons chaque jour à quels abîmes