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Mais il attendit en vain : on avait des nouvelles de Léon par quelques-uns de ses anciens camarades et notamment par Henri Clergeau ; mais Léon lui-même ne donnait pas signe de vie ; aux lettres les plus pressantes aussi bien qu’aux demandes de rendez-vous, il ne répondait point, et quand ses anis, cédant aux instances de Byasson, voulaient aborder ce sujet avec lui, il leur fermait la bouche dès le premier mot ; Henri Clergeau, ayant voulu insister et revenir à la charge, n’avait obtenu que des paroles de colère qui avaient amené une brouille entre eux.

— J’ai assez d’un conseil judiciaire, avait dit Léon, je ne veux point d’un conseil d’amis.

Avec ses créanciers, Rouspineau, Brazier, Léon avait pratiqué ce même système de faire le mort, et il les avait renvoyés à son conseil judiciaire ; il n’avait rien, (son appartement était au nom de Cara), il ne pouvait rien : c’était à son père de payer si celui-ci le voulait bien, sinon il payerait plus tard lui-même quand il le pourrait ; et il n’avait pas pris autrement souci de leurs réclamations, se disant qu’ils lui avaient fait payer assez cher l’argent qu’ils lui réclamaient pour attendre. L’attente n’était-elle pas justement un des risques sur lesquels ils avaient basé leurs opérations ?

Heureusement pour Rouspineau et pour Brazier, M. et madame Haupois-Daguillon s’étaient montrés de bonne composition : afin de sauver l’honneur de leur nom commercial, ils avaient pris l’engagement de payer les billets à leur échéance, mais à condition qu’ils seraient protestés pour la forme, et surtout à condition plus expresse encore que cet arrangement serait tenu secret, de manière à ce que Léon ne le connût jamais.