Page:Malot - Cara, 1878.djvu/270

Cette page n’a pas encore été corrigée

Sur le canapé était un tableau tout nouvellement acheté et auquel il ne fallait pas toucher, car il n’était pas encore sec ; les chaises étaient prises, celle-ci par un vase en bronze, celle-là par un ivoire, une autre par un tas de gravures ; sur un fauteurl étaient de vieilles faïences, et debout dans les coins ou contre les meubles se dressaient en rouleau des tapis et des étoffes qui attendaient là depuis longtemps le moment où le maître s’étant décidé à faire construire la maison de campagne dont depuis quinze ans il portait et agitait le plan toujours nouveau, toujours changeant dans sa tête, on les emploierait enfin à l’usage pour lequel ils avaient été successivement achetés au hasard des occasions.

— Tu comprends bien, n’est-ce pas, mon cher enfant, dit Byasson, quelle est ma situation ? Je suis le plus vieil ami de ton père et de ta mère, le plus intime ; je suis le tien ; je t’aime comme si tu étais mon fils, moi qui n’ai pas d’enfants et qui n’en aurai jamais d’autres que ceux dont tu me feras un jour le parrain. Tu dois trouver tout naturel et légitime que je me jette entre tes parents et toi au moment où vous allez vous séparer. Et que produira cette séparation ? votre malheur, votre désespoir à tous. Je me trompe, elle fera le bonheur de quelqu’un ; mais ce quelqu’un mérite-t-il que tu lui sacrifies et ta famille, et ton avenir, et ton honneur ?

— Celle dont vous parlez sans la connaître m’aime et je l’aime.

— Sans la connaître ! Mais je la connais comme tout Paris ; sa notoriété est, par malheur, assez grande pour qu’on puisse parler d’elle avec la certitude que ce qu’on dira sera au besoin confirmé par vingt, par