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presque rien elle s’était organisé un intérieur charmant, un vrai nid, au centre de Paris, de façon à faire de sérieuses économies sur les voitures.

Et cependant, malgré ce prélèvement, son catalogue, grossi d’ailleurs par une assez grande quantité d’objets fournis par le commissaire-priseur et l’expert chargés de la vente, avait présenté un chiffre total de trois cent quarante numéros bien suffisants pour attirer les acheteurs : sous la rubrique bijoux, il y avait onze montres non chiffrées, dix-sept cravaches à pomme d’or sans initiales et vingt-deux porte-mine aussi en or et également sans initiales, le tout entièrement neuf et n’ayant jamais servi, car aussitôt données, montres ou cravaches avaient été serrées pour être vendues un jour.

De tout ce qui peut allumer les enchères, Cara n’avait refusé que deux moyens : vendre chez elle, ce qui est la suprême attraction pour le monde bourgeois, et diriger sa vente ou même simplement y assister ; mais ni l’un ni l’autre de ces moyens n’entraient dans ses habitudes distrètes, et les employer, si avantageux qu’ils pussent être, eût été donner un démenti à sa vie entière : elle ressemblait ou tout au moins elle avait la prétention de ressembler à ces fleurs qu’on voyait toujours chez elle ; elle se cachait comme la violette, et il fallait la chercher pour la trouver.

Malgré cette absence, sa vente obtint un très-beau succès ; elle produisit le chiffre respectable (respectable en tant que chiffre, bien entendu), de trois cent et quelques mille francs, qui, reproduit par « les journaux bien informés », fit rêver plus d’une pauvre fille, acharnée à l’ouvrage de sept heures du matin à dix heures du soiret gagnant quinze sous par jour.