Page:Malot - Cara, 1878.djvu/242

Cette page n’a pas encore été corrigée

de se laisser emporter par la colère et de dire son fait au vénérable négociant ; mais il s’arrêta heureusement aux premières paroles de son allocution, et, plantant là M. sont Brazier légèrement suffoqué de cette algarade, il alla chez son avocat lui conter son affaire et lui demander conseil : le temps des ménagements était passé ; il n’avait que trop attendu ; maintenant il fallait agir et au plus vite.

C’était Favas qui depuis vingt ans était son avocat ; il fut d’avis, lui aussi, qu’il fallait agir au plus vite.

— Je connais la femme, dit-il, en quelques mois elle fera contracter à votre fils pour plus d’un million de dettes, et ce qu’il y aura d’admirable dans son jeu, c’est qu’elle ne lui aura rien demandé. Il faut l’arrêter dans ses manœuvres. Pour cela la loi met à votre disposition un moyen bien simple : un conseil judiciaire, sans lequel votre fils ne pourra plaider, transiger, emprunter.

À ces mots, M. Haupois-Daguillon se récria : mon fils pourvu d’un conseil judiciaire, presque interdit, quelle tache sur son nom !

— Voulez-vous que votre fils dissipe dès maintenant la fortune que vous lui laisserez un jour ? continua Favas. Non, n’est-ce pas ? Eh bien ! vous ne pouvez recourir qu’au conseil judiciaire. Voulez-vous, je ne dis pas qu’il quitte cette femme, cela est sans doute impossible, mais qu’il soit quitté par elle, le conseil judiciaire vous en donne encore le moyen. Croyez-vous qu’elle gardera un amant qui ne pourra plus emprunter et qui n’aura que de l’amour à lui offrir ? Non. Le conseil judiciaire, malgré ses inconvénients, est la seule voie que vous puissiez suivre ; c’est celle que je