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— Je vois bien que monsieur a remarqué l’inquiétude de madame, et qu’il a vu aussi combien nous sommes toutes tourmentées dans la maison ; je ne veux pas que cette inquiétude et nos airs mystérieux lui fassent supposer des choses qui ne sont pas. Cela rendrait monsieur malheureux, et, si monsieur était malheureux, cela ferait le chagrin de madame. C’est là ce qui me décide à parler. Seusement, monsieur voudra bien me promettre à l’avance que madame ne saura jamais ce que je lui ai raconté et que c’est moi qui l’ai averti.

— Parlez.

— Eh bien, madame va être saisie et vendue.

Léon respira ; ce n’était pas cela qu’il craignait après ces savantes recommandations : pour lui, les blessures faites par les huissiers n’étaient pas graves, et leur guérison était facile.

— Il faut que vous sachiez, continua Louise, que ce misérable M. Ackar, en qui madame avait toute confiance, s’est fait remettre les valeurs de madame ; il les a vendues ou échangées et a remplacé celles qui lui avaient été confiées par d’autres qui ont tellement baissé que les vendre maintenant serait une ruine. Madame était loin de se douter de cette infamie, et, quand elle a eu besoin de payer Carbans, elle a découvert la vérité ou tout au moins une partie de la vérité, car à ce moment il y avait une certaine quantité de ces valeurs qui, étant dépréciées, devaient, dit-on, remonter un jour. Elle a cru à cette hausse, et elle a compté dessus pour payer ses dépenses. Ce n’est pas la hausse qui est venue, c’est une nouvelle baisse, et, comme madame n’a pas diminué ses dépenses, elle est poursuivie aujourd’hui par tous ses fournisseurs : le costumier, la mo-