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plaisanterie, n’osant pas l’interroger sérieusement ; mais toujours elle lui avait répondu par des réponses évasives qui, malgré sa finesse, criaient le mensonge.

Un jour, cependant, elle s’était fâchée et, sous le coup de la colère, elle lui avait répondu franchement :

— Ainsi, tu es jaloux et tu l’avoues ; Eh bien ! s’il en est ainsi, mieux vaut nous séparer tout de suite. Je te jure, tu entends bien, je te jure que je ne te trompe point. Mais te donner d’autres explications que celles que je te donne est impossible. Accepte-moi telle que je suis, ou renonce à moi. Comprends donc que montrer de la jalousie, c’est justement le contraire des égards et des sentiments d’estime que je te demandais. Il y a des femmes, elles sont bien heureuses celles-là, dont on peut être jaloux sans qu’elles en soient blessées ; il y en a d’autres, au contraire, pour lesquelles la jalousie est la plus cruelle des blessures : est-ce qu’il n’y a pas un dicton qui dit qu’il ne faut pas parler de corde dans la maison d’un pendu ? Tu ne l’oublieras point, n’est-pas ?

Il n’oublia point ce dicton, mais il n’oublia pas non plus qu’il était jaloux : comment eût-il cessé de l’être, alors que les causes qui avaient provoqué cette jalousie ne cessaient point. Et il souffrit d’autant plus de ces inquiétudes que, pour le reste, Cara s’appliquait à le rendre aussi heureux que possible : toujours prévenante, toujours caressante, toujours tendre, la plus douce, la plus agréable des maîtresses ; gaie et enjouée d’humeur, égale de caractère, passionnée de cœur, ravissante d’esprit, ne cherchant qu’à lui plaire, s’ingéniant à le charmer avec une souplesse, une fécondité de ressources, une richesse d’invention qui le frap-