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les draps ; elle continuait à trembler ; il lui présenta l’infusion ; alors elle se souleva à demi pour boire ; elle avait revêtu une chemise de nuit bordée de dentelles, et il était impossible d’avoir une attitude plus chaste et plus pudique que la sienne.

— Maintenant, dit-elle en lui tendant la tasse, il faut vous en aller ; je ne veux pas que vous passiez la nuit ici ; vous n’aurez qu’à tirer la porte, elle se fermera seule ; merci, cher monsieur, je n’oublierai jamais vos bons soins et votre complaisance. Bonsoir et merci.

Plaçant son bras sous sa tête, elle ferma les yeux pour dormir : sa pose était pleine de grâce et d’abandon ; le cou caché dans les dentelles, sa tête brune encadrée dans la blancheur de l’oreiller, la main pendante, elle était vraiment ravissante ainsi sous la faible lumière de la bougie.

Assis à une assez grande distance d’elle et accoudé sur une table, Léon se demandait si toutes les histoires qu’il avait entendu conter sur elle pouvaient être vraies : en tout cas, il était impossible d’être plus simple et meilleure fille… et jolie avec cela, mieux que jolie, charmante.

Sans doute elle voulait dormir, mais cependant elle ne s’endormit point : à chaque instant elle se tournait, se retournait et changeait de position.

— Vous ne dormez pas, dit-il, en s’approchant du lit.

— Non, je ne peux pas, quand je ferme les yeux, je vois ces deux hommes tomber là devant moi.

— Voulez-vous une autre tasse de tisseul ?

— Non, merci, j’ai trop chaud maintenant, la fièvre brûlante a remplacé la fièvre froide. Je crois que ce qui me serait le meilleur, ce serait de ne plus penser à