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sent pas passé un examen plus attentif de la marchandise qu’ils se proposaient d’acheter : jamais Madeleine n’avait ressenti une pareille humiliation ; elle était pourpre de honte.

— Et la signora nous féra la grâce nous çanter oun morceau ?

Cette parole lui fut une délivrance ; chanter, elle était là pour chanter ; elle échapperait ainsi à cet examen de sa personne.

— Mon çer ami maestro Masseo, continua Sciazziga, voudra bien accompagner la signora.

Pendant que Madeleine se dirigeait vers le piano, Lozès s’approcha d’elle et, lui parlant à voix basse :

— Chantez de votre mieux, il est inutile de crier ; c’est Masseo qui va vous juger ; il a été, dans son temps, un de nos meilleurs chefs d’orchestre.

Madeleine se sentit plus forte ; chantant pour Masseo et Lozès, elle chanterait avec confiance.

Parmi les morceaux qu’elle indiqua, Masseo en choisit trois de style différent, qui pouvaient la faire juger, et elle les chanta de son mieux, ainsi que Lozès le lui avait recommandé.

Sciazziga écouta, sans donner le moindre signe d’approbation ou de blâme.

Seul Lozès applaudit des mains et de la voix.

— Si, si, dit Sciazziga, qué cé n’est pas mal, grazia.

Quant à Masseo, son attitude était étrange ; il semblait qu’il voulût applaudir et qu’il n’osât pas.

Lorsque Madeleine eut achevé son troisième morceau, elle crut que Sciazziga allait dire s’il l’acceptait ou s’il la refusait ; mais il n’en fut rien.

— Qu’il est nécessaire que cause avec mon çer ami