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italienne qui a pour but de ne pas montrer trop d’empressement. Il est probable qu’il amènera quelqu’un avec lui, car il n’a pas toute confiance en moi, et, avant de s’engager, il aime mieux deux avis qu’un seul. Surpassez-vous donc et faites bien attention qu’on vous demande aujourd’hui plus de voix que de goût ou de savoir ; pour Sciazziga, il s’agit de juger si votre voix emplira l’Opéra, la Scala ou Covent-Garden ; n’ayez pas peur de crier.

Ce fut à quatre heures vingt minutes seulement que Sciazziga, suivi d’un vieux petit bonhomme ratatiné, fit son entrée dans l’atelier de Lozès ; pour lui, c’était un homme de cinquante à cinquante-cinq ans, gras, gros, souriant, ayant en tout la tournure et la figure d’un cuistre, doucereux, mieilleux, obséquieux. Madeleine, qui malgré son émotion l’observait anxieusement, éprouva à sa vue un mouvement répulsif ; et cependant il s’avançait vers elle en souriant, ne la quittant des yeux que pour admirer un gros brillant qu’il portait à son doigt.

Arrivé près d’elle, il la salua avec des grâces de théâtre, les bras arrondis, le dos voûté, marchant en rond comme les comédiens qui veulent remplir la scène.

— La signora, n’est- pas ? dit-il avec un très-fort accent italien en s’adressant à Lozès.

— Apparemment.

Alors, tirant un face-à-main en or et le braquant sur Madeleine, il se mit à tourner autour d’elle.

Çarmante, çarmante, disait-il à chaque pas en souriant à son acolyte ; figoure expressive, avec de la nobilité, belle taille, cévéloure splendide.

Les marchands d’esclaves ou des maquignons n’eus-