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sait la différence qui sépare l’amateur, même le meilleur, d’un artiste, même médiocre.

Elle avait beaucoup à étudier, beaucoup à acquérir avant de pouvoir paraître sur un théâtre.

Au point de vue du travail, cela n’avait rien pour l’effrayer ; elle se sentait forte et vaillante.

Mais, au point de vue des moyens de travail, elle était au contraire pleine d’inquiétude : comment étudier, comment payer les maîtres qui la feraient travailler, quand elle ne possédait rien que quelques centaines de francs, des bijoux et des effets personnels ?

Elle pouvait à la vérité se présenter au Conservatoire dont les cours sont gratuits, mais on n’est admis au Conservatoire que sur le dépôt d’un acte de naissance, et dès lors il serait trop facile de savoir ce qu’elle était devenue, c’est-à-dire que son oncle, sa tante, Léon lui-même interviendraient aussitôt pour l’empêcher d’exécuter son dessein.

Elle avait assez vu et assez entendu les artistes qui venaient chez son père pour savoir qu’il y a des professeurs avec lesquels les élèves pauvres peuvent faire des arrangements : tant que l’élève est élève et étudie, il ne paye point son professeur, mais du jour où il est artiste et où il a des engagements, il abandonne sur ses appointements un tant pour cent plus ou moins fort et pendant une période plus ou moins longue au professeur qui l’a formé.

C’était un de ces professeurs qu’il lui fallait, qui ne se fit payer que dans l’avenir ; une part pour le maître, une autre pour les créanciers de son père, et tout était sauvé.

Le point le plus délicat maintenant était de savoir