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savait maintenant ce qu’elle avait à faire, sa route était tracée.

Elle sauverait l’honneur de son père, — et elle sauverait la pureté de son amour.

XVII

Au temps où l’avocat général réunissait souvent le soir dans sa maison du quai des Curandiers, des amis pour faire de la musique, on avait dit à Madeleine qu’elle gagnerait quand elle le voudrait cent mille francs par an au théâtre avec sa voix et son talent.

— Quel malheur que vous ne soyez pas dans la misère ; lui répétait souvent un vieil ami de son père qui en sa jeunesse avait été un grand artiste ; la position de votre père privera la France d’une chanteuse admirable.

Alors elle avait souri de ces compliments aussi bien que de ces regrets, et jamais l’idée ne lui était venue qu’elle pourrait chanter un jour pour d’autres que pour son père, pour ses amis ou pour elle-même. Comédienne, chanteuse, la fille d’un magistrat, c’eût été folie.

Ce qui lui avait paru folie à cette époque ne l’était plus maintenant.

Elle n’était plus la fille d’un magistrat, elle était celle d’un homme ruiné, et ce que la haute position de celui-