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trait devant lequel elle brûlait comme un cierge devant une sainte image.

Et de fait pour Madeleine n’en était-ce point une : celle de son dieu, devant qui elle restait agenouillée lui demandant l’inspiration.

Elle lui avait promis de lui écrire si on la pressait de se marier, mais la promesse qu’elle lui avait faite alors était maintenant impossible à tenir.

Il arriverait, cela était bien certain, si elle lui écrivait qu’on voulait la marier à Saffroy. Mais alors que se passerait-il ?

Ou Léon prendrait son parti, et alors il se fâcherait avec son père et sa mère.

Ou il l’abandonnerait, et alors la blessure serait si affreuse pour elle qu’elle ne se sentait pas le courage d’affronter un pareil malheur, quelque invraisemblable qu’il fût pour son cœur.

Non, elle ne devait pas l’appeler à son secours, et seule elle devait agir.

— N’est-ce pas, Léon ? dit-elle en s’adressant au portrait d’une voix suppliante, parle-moi, inspire-moi.

Et elle resta les yeux attachés sur cette image, les mains tendues vers elle.

La bougie s’était consumée et, arrivant à sa fin, elle jetait des lueurs inégales et vacillantes : tout à coup Madeleine crut voir les yeux du portrait lui sourire ; ils la regardaient avec une tristesse attendrie ; ils lui parlaient. Et comme elle cherchait à les bien comprendre, brusquement la nuit se fit épaisse et noire ; la bougie venait de mourir.

Elle se releva, et à tâtons, elle gagna son lit sans avoir l’idée d’allumer une autre bougie : à quoi bon ? elle