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LES PREMIERS FRANÇAIS DANS L’INDE

colles qu’ils déployaient alors en Europe[1]. Le pouvoir et les ressources lie la France, l’inviolabilité de ses enfants étaient des sujets sur lesquels les Français ne s’appesantissaient jamais dans l’Inde. Ils avaient soin, au contraire, de montrer la plus grande déférence pour les désirs des princes avec lesquels ils se trouvaient en contact, et de tâcher de gagner leur confiance en reconnaissant leur pouvoir et leur autorité. En un mot, leur politique était d’adopter autant que possible les usages indigènes, sans cependant se départir de ces principes sévères dont la pratique fidèle pouvait seule leur mériter la confiance. Sous ce rapport, le législateur de Pondichéry avait beaucoup à réparer, car les circonstances fâcheuses qui avaient caractérisé l’abandon de Surate avaient porté atteinte au crédit des Français. Quoique Martin ait dû inévitablement laisser à ses successeurs le soin d’effacer complètement cette tache, il avait déjà, par sa droiture dans les affaires, mis ses relations avec les indigènes sur un pied tel que ceux-ci avaient pleine confiance en lui et en ses compatriotes qu’ils entouraient d’estime et de respect. Ce fut ainsi qu’il posa les bases de cette intime liaison avec les pouvoirs indigènes dont ses plus illustres successeurs firent usage pour élever un empire français dans l’Inde. Il est probable que, livré pendant si longtemps à ses propres ressources, il avait compris qu’une politique conciliante était celle qui lui donnerait le plus de sécurité. Même dans ce cas, c’est toujours à lui qu’on doit sans aucun doute attribuer le mérite d’avoir su s’insinuer si bien dans l’esprit des natifs, qu’il savait les faire servir à ses projets tout en paraissant déférer à leurs désirs, profiter de l’attaque de Sevadgi pour réclamer ia protection des Mahrattes, et convertir le prêt fait à Shere Khan Lodi en un moyen d’obtenir un revenu fixe et perpétuel.

Un des résultats remarquables de l’habile politique de Martin, c’est que les progrès de Pondichéry ne causèrent ni envie, ni appréhension à aucun des gouvernements du pays, et ce résultat ne peut être attribué qu’à la confiance que sa politique avait inspirée. Les canons des remparts étaient regardés non comme une

  1. Histoire des Indes-Orientales.