égalées. Les plans de campagne qu’enfantait le cerveau de Dupleix étaient de premier ordre, mais ils échouaient à l’exécution, parce qu’ils devaient être confiés à des lieutenants. Ses ordres, ses lettres, ses prières témoignent encore de nos jours de la rectitude de son jugement. Il eut été facile de s’y conformer ; la chute de Trichinopoly en serait inévitablement résultée pendant que Clive était encore assiégé à Arcate, ou si quelque circonstance imprévue avait entravé ce grand triomphe, en obéissant ponctuellement aux instructions de Dupleix, on aurait intercepté et détruit sur les bords du Gauveri les corps envoyés à son secours par Lawrence, Mais on ne saurait concevoir une inertie et une pusillanimité comparables à celles de Law ; elles étaient telles, que M. Orme, cet historien que nous trouvons toujours si jaloux de la réputation des commandants anglais, est amené à dire qu’il est difficile de déterminer si, après l’arrivée de Clive et de Lawrence à Trichinopoly, les Anglais se conduisirent avec plus de capacité et de bravoure, ou les Français avec plus d’irrésolution et d’ignorance qu’auparavant.
Pour apprécier Dupleix à sa juste valeur, il faut examiner ce que fut sa conduite après les revers que nous venons de raconter. Quelle était alors sa situation ? Law et ses troupes sont battus et prisonniers ; d’Auteuil a subi le même sort avec tous les soldats disponibles pour les garnisons ; Bussy avec ses forces est à Aurungabad ; enfin Chunda-Sahib, son fidèle allié, a eu la tête tranchée, et son armée n’existe plus. Il ne restait à Dupleix que Pondichéry, Gingi et les possessions de la côte, sans garnisons pour les défendre et encore moins de troupes pour occuper la campagne. Ses ennemis triomphants, en possession de l’influence et des avantages matériels vers lesquels avaient tendu tous ses travaux et ses désirs, étaient en position de l’accabler s’ils le voulaient. Non-seulement ils avaient des alliés, mais deux excellents officiers à leur tête. Dupleix n’avait plus une armée, plus un allié et, depuis le départ de Bussy, plus un général ; il ne devait plus compter que sur lui-même et sur un second lui-même, sa vaillante femme, qui fut sa digne aide, sa conseillère infatigable. Voyons comment cet homme, ainsi accablé, en face d’une puissance si supérieure, sut tenir tête à l’ennemi.