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LES PREMIERS FRANÇAIS DANS L’INDE

longtemps à les continuer et n’y consentit enfin que lorsque la force des événements l’eut convaincue qu’il n’y avait pas de milieu entre sa propre ruine et leur exécution.

N’est-il pas étrange que toutes ces merveilles soient aujourd’hui presque oubliées ? Il est vrai qu’il fut publié, dans le dernier siècle, une relation des faits se rattachant à la formation et au progrès de la Compagnie française des Indes-Orientales ; mais cet ouvrage est peu connu de la génération actuelle, et, d’ailleurs, depuis sa publication, la lumière s’est faite sur beaucoup d’événements alors voilés aux yeux des contemporains par l’ombre et le mystère. On rencontre par hasard quelques aperçus des hauts faits des Français sur le sol indien dans les anciens récits de voyages célèbres, ou encore dans les ouvrages oubliés des historiens français sur l’Inde, ou enfin dans les histoires plus récentes consacrées par les Anglais à la glorification de leurs compatriotes. Il arrive encore de trouver dans quelque ancien mémoire biographique ou dans des notes annexées à quelque histoire plus importante, d’intéressantes notices sur ces hommes qui, après avoir vu s’anéantir les projets et les espérances de leur nation, continuèrent encore une lutte énergique sous les ord res des princes indigènes pour s’opposer au développement de la puissance de leurs rivaux. Nous nous sommes souvent étonné qu’il ne se soit pas trouvé un Français qui entreprît une histoire plus moderne de ces événements dramatiques. Serait-ce parce qu’un désastre a été le dénoûment de ces brillantes perspectives ? Mais aucun discrédit n’a pu en rejaillir sur les armes françaises ; s’il y eut de la honte, elle ne peut être imputée qu’à l’administration décrépite du représentant de la monarchie. Nous croyons devoir attribuer cette lacune dans la littérature moderne à ce fait que la Révolution française a creusé un profond abîme entre les temps dont nous nous occupons et le présent.

Nous avons dit que trois des puissances maritimes de l’Europe avaient formé des établissements permanents dans l’Inde avant que la France eût fixé son attention sur les avantages qui en devaient être n’cueillis. Cette indifférence doit être attribuée bien moins à un mamiue d’initiative de la nation elle-même, qu’aux folles distractions dans lesquelles se plongeait son gouvernement. Une époque